Stanley Kubrick, un style unique

Le jeune Stanley Kubrick, autodidacte, apprend les ficelles du métier de cinéaste lors de ses quatre ans passés comme photographe au magazine Look. C'est à cette époque qu'il décide de commencer sa « formation » en fréquentant assidûment les salles de cinéma…

L'esthétique
Ses goûts sont éclectiques, avec une préférence, comme il le dit en 1963 dans la revue Cinéma, pour le cinéma d'auteur européen comme celui d'Ingmar Bergman,Michelangelo Antonioni ou Federico Fellini. Cependant, c'est par les films de Max Ophüls comme Le plaisir ou Madame de... qu'il sera particulièrement influencé, notamment le mouvement complexe et sans heurt de la caméra et les nombreux travellings. De son expérience de photographe, il retiendra la composition d'une image, les éclairages, l'usage des extérieurs et l'art de saisir le mouvement.

Kubrick apprend réellement tous les métiers du cinéma en faisant tout lui-même dans ses premiers films — scénariste, ingénieur du son, monteur, réalisateur… — ce qui lui permettra par la suite d'intervenir et d'imposer ses points de vue à ses techniciens lors des tournages afin d'obtenir l'image exacte qu'il recherchait. Il démontre ainsi dès 1954, avec Le Baiser du tueur, son talent à jouer avec l'ombre et la lumière et confirme sa maîtrise technique dans la scène de règlement de comptes dans un entrepôt de mannequins. Il démontre aussi rapidement à ses équipes techniques ses connaissances et son intérêt pour la photographie et la prise de vue14. Pour lui, un réalisateur est à la fois metteur en scène et technicien.

Au fil de ses films, Kubrick ajoute de nouvelles techniques à sa réalisation qu'il ne cesse de perfectionner par la suite. C'est à cette époque qu'il se fait remarquer par le brillant de sa photographie. En 1956, dans L'Ultime Razzia, Kubrick fragmente l'histoire que seule la voix off très influencée par Citizen Kane d'Orson Welles permet de reconstituer.

A partir de 2001, l'Odyssée de l'espace, le cinéaste travaille de plus en plus lentement, poussant de plus en plus loin son perfectionnisme et sa volonté d'expérimentation technique. Pour son premier film en couleur, il va passer cinq ans à développer ce film, qui, par son esthétique et sa mise en scène, marque un tournant dans le cinéma mondial, en particulier dans le domaine de la science-fiction. Souhaitant une vision de l'espace éloignée des bandes dessinées et proche des observations scientifiques, il prend pour directeur de la photographie Geoffrey Unsworth, spécialisé dans la science-fiction. Celui-ci utilise le format Super Panavision 70 et bénéficie du perfectionnement de nouvelles techniques (socles, grues, perches, bras articulés), permettant rotations et mouvements aériens de la caméra comme si elle-même était en impesanteur. Il ajuste également, sur les conseils et avec l'aide d'astronautes et de spécialistes dans le domaine, ses éclairages pour être conforme à la volonté très précise du cinéaste. Le tournage nécessite quatre mois de travail pour les acteurs, et dix-huit pour les effets spéciaux.

Pour Barry Lyndon, le réalisateur veut tourner un film à l’esthétique proche des tableaux du XVIIIe siècle. Pour recréer les conditions de l'époque, les intérieurs sont éclairés à la bougie, le visage des acteurs maquillés de blanc, les cheveux ternis par la poudre. La réalisation du film demande plus de 250 jours. Pour retrouver les conditions de lumière dans les anciens châteaux anglais, le réalisateur s'astreint à un éclairage des scènes d'intérieur quasiment à la lueur des bougies. Il se procure un objectif d'appareil photo Zeiss d'une focale de 50 mm et une ouverture maximale de f/0.7, développé spécialement pour la NASA pour photographier l'alunissage de la capsule Apollo, mais encore jamais utilisé au cinéma. Il le fait monter sur une caméra réaménagée spécialement. Pour Kubrick ce n’est pas un gadget ou une lubie, le réalisateur veut préserver la patine, et l’ambiance d’un château dans la nuit du XVIIIe siècle. Il précise : « L'éclairage des films historiques m'a toujours semblé très faux. Une pièce entièrement éclairée aux bougies, c'est très beau et complètement différent de ce qu'on voyait d'habitude au cinéma. » Cette contrainte technique sera néfaste au budget du film qui passe de 2,5 millions à plus de 11 millions de dollars. Le diaphragme de l'objectif de très grande ouverture (f/0.7), limite considérablement la profondeur de champ de la scène. Le réalisateur utilise également le zoom et les longues focales, ce qui a pour effet d'« aplatir » l'image.

La musique
La musique a une grande importance dans la majeure partie de l'œuvre de Kubrick. Ce n'est pas la musique qui sert le film, mais le film qui sert la musique. Kubrick privilégie dans la plupart de ses films la musique classique et souvent déjà préexistante.

Dans 2001, l'Odyssée de l'espace, pour la première fois, Stanley Kubrick incorpore de la musique classique à un de ses films : la composition de la musique prévue ayant du retard, il meuble la bande-son avec de la musique classique pour le pré-montage. Alors que la MGM veut imposer au réalisateur une musique originale, composée par Alex North, Kubrick réussit à garder ses choix originels : Le Beau Danube bleu de Johann Strauss II, Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, et György Ligeti pour la séquence de la porte stellaire. C'est à la musique de Wendy Carlos qu'il fait appel, entre autres, pour Orange mécanique. ÀPenderecki pour Shining.

Kubrick voulait que la musique corresponde à l'époque de l'histoire racontée. Ainsi, dans Full Metal Jacket, film sur la guerre du Viêt Nam, il utilise des chansons des années 1960, époque du conflit. Mais pour la musique de Barry Lyndon, Stanley Kubrick emploie des œuvres de Bach, Mozart, Vivaldi, Haendel et Schubert, alors que ces compositeurs ne sont pas tous du XVIIIe siècle. Il doit faire des concessions ; « J'ai chez moi toute la musique du XVIIIe siècle enregistrée sur microsillons.[...] Malheureusement, on n'y trouve nulle passion, rien qui, même lointainement, puisse évoquer un thème d'amour. » Ne trouvant d'ailleurs pas de musique d'époque suffisamment dramatique pour la scène du duel final, il demande à Leonard Rosenman de réorchestrer la Sarabande de Haendel à un tempo plus lent.

La musique de son dernier film, Eyes Wide Shut est marquante par ses motifs linéaires de piano extraits de Musica Ricercata de György Ligeti. Elle accentue le malaise des situations vécues par le personnage deTom Cruise.

Voix off
C'est en 1955 dans Le Baiser Du Tueur que Kubrick insère pour la première fois une voix off. Le personnage principal Davey reconstitue en effet la chronologie de la narration grâce à sa voix off. En 1956 sort le troisième film de Stanley Kubrick, L'Ultime Razzia (The Killing). Kubrick fragmente l'histoire que seule la voix off, très influencée par le Citizen Kane d'Orson Welles, permet de reconstituer. Il utilisera encore plusieurs fois la voix off par la suite, notamment dans Docteur Folamour et Barry Lyndon.

Dans Orange mécanique et Full Metal Jacket, c'est la voix intérieure, monologue qui n'est pas prononcé par un personnage mais qui exprime ses pensées au moment de la scène, qu'il utilisera pour la narration.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici.

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