Sami vit heureux dans une cité de banlieue, entre ses amis, voisins et sa femme Alice. Pour l’anniversaire de son fils, l’homme le plus riche de France fait ouvrir le grand magasin qui lui appartient. Alexandre choisit Sami, le gardien de nuit, comme nouveau jouet...
Comment l’aventure a-t-elle démarré pour vous ?
C’est le producteur Richard Grandpierre qui m’a proposé de prendre en main ce projet. Je lui ai d’abord demandé s’il était fou (rires), avant de revoir le film original, avec ma femme, qui est aussi ma coscénariste. J’ai alors compris qu’il y avait un autre point de vue à offrir sur ce sujet. Ma sensation a été radicalement différente de celle que j’avais eue quand je l’avais vu gamin. Le Jouet de Francis Veber est à mes yeux son film le plus fort, et le plus fou. Je me suis rendu compte que les thèmes du film, déjà actuels à l’époque, l’étaient encore plus aujourd’hui : la fracture sociale, l’enfant-roi et la question de savoir si l argent peut tout. En s’éloignant un peu de la dureté de l’original, qui en fait néanmoins sa force, nous avons eu envie d’aller vers plus d’humanité et de développer le thème de la paternité.
Avez-vous écrit le scénario avec le nom des acteurs en tête ?
Il faut écrire la meilleure histoire possible sans penser aux acteurs. Si on écrit un film pour quelqu’un en particulier, et qu’il ou elle n’est pas intéressé, ou indisponible, c'est sans appel. Ensuite, on quitte le costume de scénariste pour celui de metteur en scène, et on redécouvre l’histoire en se demandant quels sont les meilleurs acteurs possibles. Lorsque nous avons eu un script suffisamment abouti, nous l’avons envoyé à Daniel Auteuil, il a été séduit et a aussitôt demandé qui allait interpréter Sami. Pour tous, la meilleure option, voire la seule, était Jamel. Il nous a dit « On habite à dix minutes l’un de chez l’autre à Paris, à Avignon, et en Corse et cela fait longtemps qu’on doit tourner ensemble ! ». Daniel s’est proposé d’appeler lui-même Jamel pour lui parler du projet.
Au départ, son fils est parfaitement détestable.
Au fond, le personnage principal, c’est l’enfant. Il est la clé de voûte du film. Le pari du film était d’avoir un gamin qu’on déteste au départ et qui arrive à nous retourner. Plus on réussirait à pousser son côté détestable, plus il serait irrécupérable, plus le pari serait gagné lorsque qu’il nous retournerait de son côté. Mais pour cela, il fallait un enfant de 12 ans qui ait la maturité et le talent de jouer la scène de la cabane où Alexandre parle de sa mère et lâche les vannes. J’ai rencontré 150 enfants et Simon Faliu était loin devant tous les autres dans sa capacité à exprimer l’émotion de cette séquence. Il a la faculté de jouer sur les deux facettes : Voldemort et Harry Potter ! (rires) Simon a été à la hauteur de Daniel et de Jamel, c’est un garçon rare qui a fait preuve d’une sensibilité et d’une justesse à toute épreuve.
Où avez-vous filmé ?
Nous avons eu la chance de trouver un château qui n’avait pas été filmé depuis longtemps, à Rochefort-en-Yvelines. C’est un lieu le plus souvent loué pour des réceptions et des séminaires d’entreprises, mais avec la Covid, nous avons pu en disposer pendant deux semaines en continu. Les extérieurs jardins et les bois environnants ont été tournés dans deux autres châteaux.
Comment avez-vous envisagé le personnage d’Alice ?
Il est d’autant plus important qu’il est le principal rôle féminin. Dans ce film avec trois héros, il y a cette femme qui tient le gouvernail et met tout le monde d’accord en quelques scènes. Il me fallait une comédienne qui parvienne à trouver sa place dès le premier jour et à faire exister une telle femme. Grâce à Alice Belaïdi, on a le sentiment que le personnage est beaucoup plus présent à l’écran qu’il ne l’est en réalité. Alice est arrivée parfaitement préparée, avec de formidables propositions. C’est une incroyable comédienne et le couple qu’elle forme avec Jamel fonctionne à merveille.
Le film s’oriente par moments vers la comédie sociale, avec la fermeture de l’usine, la mobilisation du syndicat et la fronde des salariés qui se retrouvent sur le carreau…
Un des thèmes du film est la question de savoir si l’argent peut tout. L’argent corrompt les hommes et les rend fous : le meilleur ami de Sami est prêt à le débiner à la télévision. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux c’est exponentiel, tout peut basculer en une seconde et on peut fusiller un être humain en deux tweets.
Il y a un très joli contrepoint à l’immersion de Sami dans l’univers de Philippe Etienne, avec l’arrivée d’Alexandre dans l’univers de Sami…
Quand Alexandre découvre le monde de Sami, il redevient enfant dans cette cité en vie, et réapprend à jouer avec simplicité. Alexandre est très heureux que sa voiture soit tombée en panne : il s’est fait des potes parmi les enfants de la cité et n’a aucune envie de revenir chez son père. Je voyais un peu le film comme une comédie romantique entre deux mondes, celui de Sami et celui de Philippe Etienne. C’est toujours extrêmement gratifiant de passer de l’émotion au rire, et du rire à l’émotion : ce sont deux éléments qui se nourrissent l’un l’autre.
Comment avez-vous travaillé la musique ?
Il était important d’avoir à la fois un thème nostalgique qui touche à l’enfance, véhiculant de l’émotion, et un traitement actuel pour apporter de la modernité. J’ai fait appel à deux jeunes compositeurs, Goodwing and Foltz, deux garçons qui travaillent autant l’électro que les instruments classiques et qui m’ont composé exactement la musique que je cherchais, mais en beaucoup mieux.
Comédie de James Huth. 3,5 étoiles sur AlloCiné.