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Rupture du contrat de travail : un an pour la contester


L'adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 1 février 2023. Pourvoi n° : 21-12.485

[…]

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 décembre 2020) et les productions, Mme [B] a été engagée le 19 octobre 2009 par la société Aquilab (la société) en qualité d'ingénieur.

2. Après avoir été convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique, fixé au 23 juillet 2014, au cours duquel il lui a été proposé d'adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle et après que la société lui a notifié, le 31 juillet 2014, le motif économique de la rupture, elle a adhéré le 7 août 2014 au dispositif et a demandé, le 13 août 2014, à bénéficier de la priorité de réembauche.

3. Elle a saisi la juridiction prud'homale, le 19 janvier 2016, pour contester la réalité du motif économique invoqué par l'employeur et obtenir paiement de diverses sommes au titre de la rupture.

Examen des moyens

[…]

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche. Enoncé du moyen

13. La société fait grief à l'arrêt de dire que les demandes de la salariée n'étaient pas prescrites et de la condamner à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'ordonner le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des indemnités de chômage du jour du licenciement dans la limite de six mois en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, alors « que le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, si elle invoquait la prescription des demandes de la salariée relatives à la rupture de son contrat de travail, elle se fondait, tant dans les motifs que dans le dispositif de ses conclusions, non seulement sur les dispositions de l'article L. 1235-7 du code du travail mais aussi et surtout sur celles de l'article L. 1233-67, propres aux salariés ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle, en prenant soin de critiquer les motifs du jugement qui avait rejeté ce second fondement ; qu'en affirmant que ''la société Aquilab conclut à la prescription de l'action engagée par Mme [E] [B], épouse [I], au motif que celle-ci n'a pas été engagée dans les 12 mois prévus à l'article L. 1235-7 du code du travail'', pour limiter son analyse à cette seule cause de prescription, la cour d'appel qui a méconnu les termes clairs et précis des conclusions de l'employeur qui invoquaient parallèlement un autre fondement textuel pour conclure à la prescription, a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

14. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

15. Pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription et condamner la société au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société conclut à la prescription de l'action engagée par la salariée au motif que celle-ci n'a pas été engagée dans les douze mois prévus à l'article L. 1235-7 du code du travail, que cependant, ce texte n'est applicable qu'aux contestations de nature à entraîner la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi, et non à sa contestation ne visant que l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.

16. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la société se fondait non seulement sur les dispositions de l'article L. 1235-7 du code du travail mais également sur celles de l'article L. 1233-67 du même code, applicables aux salariés ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

17. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

18. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

19. Selon l'article L. 1233-67du code du travail, dans sa version en vigueur du 30 juillet 2011 au 1er janvier 2015, toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif, résultant de l'adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle, se prescrit par douze mois à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

20. La salariée ayant adhéré, le 7 août 2014, au contrat de sécurisation professionnelle, l'action qu'elle a engagée le 16 janvier 2016 pour contester la rupture de son contrat de travail, soit au-delà du délai de douze mois prévu par ce texte, est prescrite.

21. Ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail sont en conséquence irrecevables.

22. La cassation des chefs de dispositif condamnant la société à verser à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant la société aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la demande relative au bien-fondé du licenciement n'est pas prescrite, condamne la société Aquilab à payer à Mme [B], épouse [I], la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ordonne le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des indemnités de chômage payées à la salariée licenciée du jour de son licenciement dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 18 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DIT que les demandes de la salariée sont irrecevables ;

Condamne Mme [B], épouse [I], aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille vingt-trois.

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