La Cour de cassation vient de rappeler qu'on ne peut déduire les allocations chômage de l'indemnité d'éviction due par l'employeur dès lors qu'est caractérisée une atteinte au droit à la protection de la santé.
[...]
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juillet 2021), Mme [K] a été engagée le 16 juillet 2016 en qualité d'employé polyvalent par la société Somerha, à la suite de la rupture du contrat de travail qui la liait à la société Hygiène environnement industriel (la société HEI), aux droits de laquelle vient la société Atalian propreté.
2. Le 7 septembre 2016, au cours de la période d'essai, l'employeur lui a notifié la rupture du contrat de travail.
3. Le 8 novembre 2016, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à l'encontre des sociétés HEI et Somerha au titre de la rupture du contrat de travail.
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
5. La salariée fait grief à l'arrêt de déduire, pour fixer le montant du rappel de salaire dû par l'employeur sur la période écoulée entre la rupture de la période d'essai survenue le 7 septembre 2016 et la date de sa réintégration effective le 18 septembre 2018, les sommes perçues au titre des allocations de Pôle emploi, alors « que lorsque le salarié demande sa réintégration dans l'entreprise, en raison de la nullité de la rupture de son contrat de travail survenue pour un motif discriminatoire contraire à un droit constitutionnel, il a droit à une indemnité égale aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et sa réintégration dans l'entreprise, sans que l'employeur ne puisse déduire les éventuels salaires ou revenus de remplacement perçus par le salarié pendant cette période ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé nulle la rupture de la période d'essai de Mme [U] en ce qu'elle portait atteinte à son droit à la protection de sa santé, constitutionnellement garanti par l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel renvoie celui de la Constitution du 4 octobre 1958 ; que dès lors en condamnant l'employeur à une indemnisation calculée sur la base des salaires qui auraient dû être versés entre la rupture discriminatoire et la date de réintégration, déduction faite des sommes perçues par la salariée au titre des allocations de Pôle emploi, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, ensemble l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. »
Vu l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail :
6. Selon les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, toute rupture du contrat de travail prononcée à l'égard d'un salarié en raison de son état de santé est nulle.
7. Dès lors qu'il caractérise une atteinte au droit à la protection de la santé, garanti par l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction et sa réintégration, peu important qu'il ait ou non reçu des salaires ou revenus de remplacement pendant cette période.
8. Après avoir jugé nulle la rupture du contrat de travail pour discrimination liée à l'état de santé de la salariée et ordonné sa réintégration, la cour d'appel a condamné l'employeur à lui payer un rappel de salaire entre la rupture de la période d'essai et la date de réintégration effective de la salariée, en déduisant les sommes perçues au titre des allocations de Pôle emploi.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
12. La rupture du contrat de travail de la salariée ayant été jugée nulle pour discrimination liée à son état de santé, l'employeur sera condamné à payer à la salariée, qui a été réintégrée, une indemnité d'éviction représentant le montant des salaires qu'elle aurait dû percevoir entre le 7 septembre 2016, date de la rupture, et le 18 septembre 2018, date de sa réintégration effective, soit la somme de 24 460,80 euros, sans qu'il soit fait déduction des sommes perçues au titre des allocations de Pôle emploi, outre une somme de 2 446 euros au titre des congés payés afférents.
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Somerha à payer à Mme [K] la somme de 16 197,64 euros au titre du rappel de salaires entre la rupture de la période d'essai le 7 septembre 2016 et la date de réintégration effective de la salariée le 18 septembre 2018 et la somme de 1 619,76 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 8 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société Somerha à payer à Mme [K] la somme de 24 460,80 euros au titre de l'indemnité d'éviction, outre 2 446 euros, au titre des congés payés afférents ;
Condamne la société Somerha aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Somerha à payer à Mme [K] la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois.
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