Charlie, 20 ans, étudiante revient dans la ferme familiale en Virginie pour aider sa mère qui est souffrante. Elles ont une vision différente de la vie : Charlie étudie la finance tandis que Laura gère un élevage de poules. Après une longue absence, Solange, la mère de Laura, grand-mère de Charlie, débarque à la ferme. Elle est française, féministe et excentrique.
Hanna Ladoul : Il y a quelques années, alors qu’on habitait avec Marco aux États-Unis, ma mère m’a appelée à Noël avec une sorte d’énorme tumeur au niveau du cou. C’était sur FaceTime, je me trouvais loin d’elle et ça m’a inquiétée. Finalement il s’est avéré que c’était complètement bénin. Mais on est venus à s’imaginer que si ça avait été grave j’aurais dû retourner vivre à ses côtés au fin fond de la campagne en Normandie, un endroit que j’ai toujours voulu quitter.
Marco La Via : Cette fausse alerte a ouvert les vannes de notre imagination de scénaristes. On a toujours été fascinés par les trajectoires de femmes dans la famille d’Hanna, comme dans la mienne. Hanna, sa mère et sa grand-mère sont par exemple trois femmes très libres et indépendantes, mais chacune à leur façon, et ce n’est pas dit qu’elles puissent se comprendre sur tous les sujets. Les imaginer coincées ensemble dans une maison pendant toute une année nous semblait fascinant à la fois amusant et émouvant, et c’est ce qui a donné envie de créer les personnages et l’histoire d’AU FIL DES SAISONS.
Marco La Via : Oui, le scénario s’est dès l’origine construit sur cette période d’une année et sur cette évolution des saisons qui donne aussi à voir l’évolution de la maladie, l’évolution de la relation entre les trois personnages et le portrait des évolutions de chacune.
Hanna Ladoul : Pour Charlie, cette situation de départ est très dure. Revenir dans un endroit qu’elle a toujours voulu quitter pour s’occuper de sa mère malade et d’un élevage de poules représente un énorme sacrifice. Car elle a sa vie à mener. Elle a donc un dilemme moral, mais décide de rester. Rétrospectivement, elle se dira peut-être que c’était la plus belle année de sa vie car elle a pu véritablement comprendre qui étaient sa mère et sa grand-mère et éclairer ses origines. Et il y a aussi cette thématique de l’abandon qui se renouvelle de mère en fille. Quelque chose est cassé dans cette relation intergénérationnelle et le fait de se retrouver toutes les trois cette année-là va permettre une possible réparation de ce schéma familial qui se répétait.
Hanna Ladoul : Au niveau de la photographie déjà, comme le film se passe sur les quatre saisons, il y avait une couleur par saison. Dans ce travail visuel, l’été est par exemple beaucoup plus chaud que l’hiver, qui est lui beaucoup plus bleu. Et de façon plus globale, comme on voulait faire un conte, un conte de femmes, il nous fallait une image assez stylisée afin de ne pas être dans un réalisme pur.
Marco La Via : Il y avait aussi l’envie à travers la photographie de filmer ces femmes ordinaires comme des héroïnes. On aurait pu faire un film très naturaliste, mais on voulait vraiment transformer nos personnages en héroïnes de cinéma. Et ça rejoint notre désir de se réapproprier à notre façon ces codes du classicisme des films américains. Avec notre cheffe opératrice Virginie Surdej, on avait des références comme les films de Frank Capra ou Clint Eastwood.
Hanna Ladoul : C’est une volonté assumée de notre part, qu’une réconciliation ait lieu après toutes ces épreuves et cette année passée ensemble. L’idée c’est un peu de dire « Passez du temps ensemble et quelque chose de bon en ressortira ».
Comédie dramatique de Hanna Ladoul et Marco La Via. Propos reccueilli par Ricci et Arnoux. 4,2 étoiles Allociné.