La Cour de cassation rappelle qu'il est important d'examiner attentivement la situation avant de prendre une décision de licenciement, en tenant compte de la gravité de la faute et de la proportionnalité de la sanction.
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 septembre 2022), M. [W] a été engagé en qualité d'acheteur par la société Etablissements Segurel et fils, à compter du 16 septembre 1996.
2. Licencié pour faute grave le 27 novembre 2018, il a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette rupture.
3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié justifié par une cause réelle et sérieuse et non pour faute grave, de le condamner à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, d'indemnité de licenciement et de lui donner injonction de remettre au salarié un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la décision, alors :
« 1°/ que constitue une faute grave, l'absence injustifiée prolongée lors d'une période d'activité intense, d'un salarié occupant un poste important dans l'entreprise en dépit d'une mise en demeure de son employeur, et ce peu important son ancienneté, son passé disciplinaire irréprochable et les raisons de son absence dont l'employeur aurait connaissance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié qui occupait un poste important de chargé des achats stratégiques de l'entreprise, ne s'était pas présenté à son poste de travail depuis le 22 octobre 2018 pendant une période d'activité intense de l'entreprise, sans à aucun moment justifier de son absence et ce malgré une mise en demeure de son employeur du 5 novembre suivant ; qu'elle a écarté la qualification de faute grave aux motifs inopérants que le salarié avait une grande ancienneté et un passé disciplinaire irréprochable, et qu'il était en situation de devoir porter assistance à sa mère en raison de son état de santé dégradé et de son isolement, ce qui était connu de l'employeur avant l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'elle s'apprécie in concreto ; qu'en l'espèce, il était constant qu'après que l'employeur avait accepté de solder 17 jours de congés payés acquis après les trois semaines de congés d'été du salarié pour lui permettre d'assister sa mère malade qui venait de perdre son époux, ce dernier avait sollicité une rupture conventionnelle que l'employeur n'avait pas acceptée, puis s'était d'autorité placé en congés sans solde à une période d'intense activité pour l'entreprise, en indiquant que toute conséquence pourrait en être tirée ; que la cour d'appel a retenu qu'en ne se présentant pas à son poste de travail en dépit de la demande de l'employeur, le salarié avait commis une faute ; qu'en se bornant ensuite, pour écarter la faute grave, à relever que le salarié était en situation de devoir porter assistance à sa mère d'une part, qu'il justifiait de 22 ans d'ancienneté sans antécédent disciplinaire d'autre part, sans rechercher si, en dépit des 17 jours de congés acceptés par l'employeur après les trois semaines de congés d'été prises par le salarié, la propre décision de ce dernier de ne pas réintégrer son travail n'empêchait pas la poursuite du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-1 du code du travail. »
4. La cour d'appel, qui a constaté que les faits reprochés au salarié d'absence injustifiée étaient établis, a pu retenir, au regard du contexte tenant à son ancienneté, à son passé disciplinaire irréprochable et à la nécessité de porter assistance à sa mère âgée, malade et isolée, qu'ils ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Etablissements Segurel et fils aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Etablissements Segurel et fils et la condamne à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille vingt-quatre.
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