Face à une invasion d'araignées, les habitants d'un immeuble vont devoir survivre.
Au cours d’un trajet en voiture après une session d’écriture en province, j’ai pris conscience que si j’avais traité beaucoup de thématiques dans mes projets, je n’avais pas étanché une soif d’aborder un propos plus personnel. J’ai repensé à ces années de galère, à réaliser des courts que l’on ne voyait pas car il me manquait les contacts, les bonnes adresses. Ce sentiment de ne pas aller où l’on souhaite. Ce que les médias appellent le « syndrome du banlieusard » existe et je l’ai vécu. J’ai élargi ma réflexion autour du délit de faciès, sujet qui me touche beaucoup, et qui s’est incarné avec l’image de l’araignée. Elle existe et se balade un peu partout chez nous, mais on ne veut pas la voir donc on l’écrase immédiatement. La symbolique de la xénophobie, de l’intolérance, elle était là. Tout le monde étant traité comme de la vermine dans ce parallèle métaphorique, le titre s’est imposé très vite.
Même si j’adore ça, je ne suis pas spécialement prédisposé au film d’horreur. Mais une invasion d’araignées dans un HLM peuplé d’habitants qui essayent de s’en sortir, c’est déjà divertissant, et il y avait en plus une dimension politique à explorer. Nous nous sommes plongés dans l’écriture avec Florent Bernard et nous avons eu très vite notre personnage principal, notre problématique, nos trois actes. J’avais à cœur de montrer la banlieue dans laquelle j’ai grandi, à Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis. C’est-à-dire un microcosme très positif, où les gens se connaissent, s’aident, s’apprécient, sont polis. Comme partout, il y a des familles dysfonctionnelles, des gens qui tournent mal, mais dans l’ensemble, les choses roulent. Cela, je ne l’avais pas encore vu sur grand écran. Soit c’était la banlieue drama, avec trafic de drogues et tutti quanti, soit la comédie potache et souvent caricaturale.
Au même titre que je voulais éviter les clichés du film de banlieue, je voulais éviter les clichés du film anti-flic qui à mon sens mettent de l’huile sur le feu et attisent la violence. Le personnage du commissaire sert à humaniser la figure robotique du policier, on le voit douter, faire des erreurs, être dépassé par les événements, mais, surtout, se plier à l’institution qui peut peser sur lui.
On fait la connaissance d’un orphelin délaissé, qui pense s’en sortir seul et qui fait le choix de s’isoler. La vie l’a brisé et, dans sa chambre d’enfant, il se sent en sécurité. Mais Kaleb va devoir comprendre qu’en fermant sa porte aux mauvaises choses , il empêche les bonnes d’arriver. Devenir adulte c’est s’ouvrir, endosser des responsabilités et savoir communiquer pour pouvoir, enfin, prétendre à un autre destin.
En partant d’une véritable araignée, la heteropoda maxima ! Je voulais m’affranchir des mygales et des tarentules qu’on a trop vues sur grand écran. Me rapprocher de celles que l’on croise dans nos appartements et maisons. Nous avons ensuite travaillé avec MacGuff sur des modèles 3D afin de les agrandir à notre guise, puis de réfléchir aux différentes manières de les intégrer dans le film. À ma demande, la team MacGuff a étudié les subtilités de déplacements des araignées, les micros mouvements de pattes, leurs imprécisions, le côté aléatoire, imprévu de l’animal… Un travail de dingue mais ce sont toutes ces petites choses qui allaient aider au rendu réaliste. J’ai aussi eu la chance de travailler avec Atelier 69 qui sont les boss des SFX. Ils nous ont conçu une véritable armée d’araignées en dur. Grâce à elles, j’ai pu composer mon cadre, ma lumière, et surtout plonger mes acteurs dans de véritables décors peuplés de petites bêtes. Certaines sont présentes à l’image mais impossible de dire lesquelles tellement elles se fondent parfaitement dans le décor.
Tout à fait, et cela a été beaucoup plus facile que ce que je pensais, notamment grâce à la Ferme Tropicale qui connaît parfaitement ces petites créatures. Elles sont très fragiles et se fatiguent très vite. Elles ne peuvent, par exemple, courir qu’une dizaine de secondes avant d’être complètement HS. C’était donc du one shot et ensuite « au dodo » pour nos actrices. Elles ont été très généreuses ! Tout le monde a adoré travailler en toute sécurité avec elles, on a même pu libérer plusieurs personnes de leur arachnophobie.
La protection animale est au centre de toute ma vie. Et donc de mon cinéma. Les animaux étaient mieux traités que les acteurs sur le tournage ! La vente et la revente des araignées, ce n’est pas fictionnel : on en trouve à 20 euros sur Internet. Dès le générique, le film dénonce en sous-marin le trafic et la condition des animaux enfermés dans des cages ou des boîtes. Car nous sommes tous des êtres vivants méritant d’évoluer librement.
Epouvante-horreur de Sébastien Vaniček. Propos reccueilli par Leslie Ricci et Audrey Le Pennec. 3,8 étoiles Allociné.