Justine, son mari et toute leur bande d'amis trouvent une solution pour résoudre leurs problèmes d'argent : organiser une fausse croisière romantique pour Franck, un gros investisseur, qui cherche à séduire une femme.
C’est un projet que j’ai en tête depuis 2003, du moment où j’ai commencé à faire de petites croisières fluviales en famille. J’ai adoré ce mode de vacances. Petit à petit, j’ai découvert une multitude de canaux il est extrêmement facile de circuler en bateau du sud de la France jusqu’en Allemagne, et même au-delà, tant le réseau de ces canaux est riche. Mais il faut un rapport au temps apaisé pour ce genre de voyage. Je rêvais d’une histoire qui puisse se dérouler dans ce rythme et ce cadre. Est venu se greffer le récit de cette croisière bidonnée, dont l’effet troupe me séduisait. Mon amour sans doute pour « To Be or Not To Be », d’Ernst Lubitsch, que j’ai vu et revu et qui m’a tant marqué.
Dans « La Petite Vadrouille », en tous cas, il y avait le plaisir d’aller pied au plancher, de ne surtout pas s’embêter avec la fameuse justesse, la vraisemblance. C’était drôle d’y aller à fond, en appuyant sur les accents, tous ces trucs très enfantins, pousser le bouchon quoi ! J’avais envie que le film soit gai. Au moment de chercher le « café chanté » par exemple, je visitais des bistrots « normaux » et je pensais : « c’est banal ». Je l’ai choisi tonitruant, en couleurs et réellement animé par des artistes. C’était la même démarche pour les costumes, les accessoires, les décors… Dès le début, le gardien de musée (Jean-Noël Brouté) porte une tenue invraisemblable de gardien digne d’un officier russe.
J’ai un excellent accessoiriste, Bruno Lefebvre. Je lui fais un dessin et il s’arrange pour construire l’objet. Comme la main devait être rétractable son support s’allonge puis la main se referme et saisit le billet mécaniquement, elle était très complexe à réaliser. Le code barre on ne le voit pas mais il marche vraiment a été entièrement peint à la main par l’équipe. Quant au hamac gonflable, il en existe un sur le marché : on n’a pas à le gonfler, c’est comme une grosse manche à air, on court et le vent se charge de le remplir d’air pour le transformer en hamac, ce qui entraîne une gestuelle comique ou gracieuse.
Cette espèce de polarisation simple entre cette vieille bande qui avance à cinq nœuds et eux qui marchent à voile m’amusait. Le contraste était drôle : quand le voilier les double, ils ont une réaction réac : « Ben, quoi, ils ne respectent même pas la vitesse réglementaire ! ». C’est une friction générationnelle classique, presque tendre.
J’espère pas ! Ce que cette petite bande de jeunes opère dans le film, c’est un retour à la réalité, à notre monde plein de tourments. Ils l’affrontent avec lucidité et poésie. Autour du feu, ils cherchent leurs mots dans un slam approximatif. Ils nous révèlent ce sur quoi tous nous cliquons à chaque entrée sur un site : « Continuer sans accepter ». Ils ne cherchent pas à améliorer les choses, plutôt à créer, ouvrir une autre voie. C’est un peu ce qu’on espère des jeunes, non ? Je suis très heureux d’avoir eu les droits pour la belle musique qui les accompagne le soir : « Washington » de Jake Xerxes Fussel.
C’est clairement et modestement un hommage au chef d’œuvre « La Grande Vadrouille » qui a illuminé mon enfance. J’admire la précision, la simplicité et l’humanité de la mise en scène de Gérard Oury.
Comédie de Bruno Podalydès. 3,1 étoiles AlloCiné.