Depuis une décennie, l’écart économique entre l’Europe et les États-Unis ne cesse de se creuser. Si les deux continents ont traversé des crises similaires, telles que les effets récessifs de la crise financière mondiale de 2008 et la pandémie de COVID-19 en 2020, l’évolution de leurs trajectoires économiques diffère nettement. Une série de facteurs structurels, politiques et sociaux explique ce décrochage qui, aujourd'hui, s'est intensifié dans divers secteurs clés tels que la croissance du PIB, l’innovation technologique, l'emploi et le niveau de vie par habitant.
Un indicateur clé illustrant le décrochage économique entre l’Europe et les États-Unis est le Produit National Brut (PNB) par habitant. Cette mesure permet de comparer le niveau de vie moyen des citoyens de chaque région, en tenant compte des différences de richesse et de productivité. Depuis une décennie, l’écart entre les deux continents s’est largement creusé. En 2023, le PNB par habitant aux États-Unis s’élevait à environ 75 000 dollars, tandis qu’il était d’environ 47 000 dollars dans la zone euro. Ce différentiel de près de 30 000 dollars est le reflet d’une différence de productivité, mais aussi d’une disparité dans les secteurs économiques dominants.
Au cours des dix dernières années, la croissance économique de l’Europe a été plus faible que celle des États-Unis. En moyenne, le PIB des États-Unis a crû de 2,3 % par an entre 2013 et 2023, contre seulement 1,3 % pour la zone euro. Plus récemment, la pandémie de COVID-19 a exacerbé ce fossé. Bien que les deux régions aient subi des contractions économiques sévères, les États-Unis ont connu une reprise plus robuste. En 2021, le PIB américain a rebondi de 5,9 %, tandis que la croissance de l'UE n’a été que de 5,3 %. Cette disparité s'est poursuivie en 2022, où la croissance américaine a atteint 2,1 % contre seulement 0,3 % pour l'Union européenne. Ce retard persistant peut s'expliquer par plusieurs facteurs, dont des différences dans les politiques économiques, les investissements dans l'innovation et la gestion de la crise sanitaire.
L’un des moteurs principaux de la croissance économique aux États-Unis est son secteur technologique, qui reste un catalyseur majeur d’innovation et de compétitivité mondiale. Les géants américains tels que Apple, Amazon, Google et Microsoft dominent le marché global des technologies, et la Silicon Valley reste un centre névralgique de l’innovation. En 2023, les États-Unis ont investi près de 500 milliards de dollars dans la recherche et le développement (R&D), soit environ 2,7 % de leur PIB, un niveau bien supérieur à celui de l’Europe (qui investit environ 2 % de son PIB en R&D). Cela a permis aux États-Unis non seulement de maintenir leur avance dans des secteurs comme l’intelligence artificielle et la biotechnologie, mais aussi d’attirer les meilleurs talents mondiaux.
En Europe, bien que des initiatives comme le programme Horizon Europe aient été lancées pour stimuler l’innovation, les investissements dans les nouvelles technologies demeurent insuffisants. Les entreprises européennes sont également moins nombreuses à se positionner parmi les leaders mondiaux de la tech. Par exemple, aucune entreprise européenne ne figure parmi les cinq premières entreprises technologiques mondiales en termes de capitalisation boursière, contrairement aux États-Unis, où Apple et Microsoft occupent régulièrement les premières positions. Ce retard en matière d’innovation limite la capacité de l’Europe à se positionner dans les secteurs économiques de demain, ce qui contribue à son décrochage.
Un autre facteur qui distingue l’économie américaine de celle de l’Europe réside dans la dynamique du marché du travail. Aux États-Unis, le taux de chômage est traditionnellement plus bas et les conditions d’embauche sont plus flexibles, ce qui favorise une plus grande mobilité professionnelle et une meilleure adaptation aux fluctuations économiques. En janvier 2023, le taux de chômage aux États-Unis était de 3,5 %, un des plus bas niveaux historiques. En comparaison, le taux de chômage moyen dans la zone euro s’élevait à 6,5 % à la même période, avec de fortes disparités entre les pays (par exemple, le chômage en Espagne dépassait les 12 %).
Cette flexibilité du marché du travail permet aux États-Unis de mieux s’adapter aux nouvelles réalités économiques et technologiques. En Europe, les rigidités du marché du travail et les différences législatives entre les États membres freinent la création d’emplois, en particulier dans des secteurs à forte croissance comme les technologies numériques. De plus, le vieillissement de la population européenne exerce une pression supplémentaire sur les systèmes de sécurité sociale, ce qui ralentit la croissance économique.
En Europe, où la part des émissions de gaz à effet de serre ne représente pourtant que 8% des émissions mondiales, les régulations écologiques sont parmi les plus strictes au monde, avec des objectifs ambitieux en matière de réduction des émanations de gaz à effet de serre, de transition énergétique, et de préservation de la biodiversité. Le Pacte vert européen (Green Deal), par exemple, vise à rendre l’Europe climatiquement neutre d’ici 2050, avec des mesures telles que la taxe carbone aux frontières et la réduction progressive de la dépendance aux énergies fossiles.
Ces normes, bien qu’essentielles pour la lutte contre le changement climatique, imposent des coûts supplémentaires aux entreprises européennes. Ce différentiel en matière de normes environnementales pourrait contribuer à accroître l’écart de compétitivité entre l’Europe et les États-Unis, en pesant sur la rentabilité des entreprises européennes tout en freinant leur capacité d’investissement et d’innovation.
En dépit des efforts déployés par l’Union Européenne pour stimuler sa croissance économique et son secteur technologique, le fossé avec les États-Unis semble se creuser de façon persistante. Pour combler cet écart, l’Europe devrait repenser sa stratégie économique et environnementale, en augmentant ses investissements en R&D, en renforçant l’intégration du marché du travail, en réformant ses politiques fiscales et économiques et en adaptant ses normes écologiques.
Sans cela, le décrochage économique risque de s’amplifier dans les années à venir d'autant plus que le nouveau président élu Donald Trump a pour projet : «_America first »...
Photo : ia - canva.
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