Ana et Yves se sont aimés passionnément puis se sont séparés. Des années plus tard, leur fille, Cécile, réalise un documentaire sur leur rencontre. Ils se revoient à cette occasion. Toujours marqués par leur amour passé, ils vont alors chercher un chemin pour revenir l’un vers l’autre.
J’ai d’abord été séduit par le titre, que je trouve beau et romanesque, puis j’ai été touché par les personnages. Yves est un homme qui prend le risque de passer à côté de sa vie. Par manque de courage ou du fait d’une pression sociale trop forte, il ne peut assumer ses attirances et mène une existence somnambulique. J’apprécie beaucoup la pudeur avec laquelle Agnès de Sacy raconte cette histoire si personnelle. J’aime aussi l’idée de jouer dans un premier film et d’être dirigé par une femme. Le regard féminin m’apaise, me sécurise et m’aide à m’ouvrir.
En posant beaucoup de questions à Agnès. Je voulais comprendre la trajectoire de son père, son attitude lorsqu’elle parlait avec lui de sa vie. Je voulais savoir si ce personnage qu’il lui avait inspiré mangeait plus le matin ou le soir, s’il s’asseyait toujours à la même place, s’il réglait sa montre régulièrement, s’il mettait un réveil le matin, s’il partait tout de suite travailler ou si, au contraire, il prenait son temps... Ce genre de choses qui peuvent paraître anodines, mais qui vous informent beaucoup sur la manière dont une personne interagit avec le monde. Comme ce personnage était très éloigné de moi, il m’a fallu du temps pour lui tourner autour et le comprendre. Lorsqu’on a répondu à toutes ces questions, tout se combine en soi et le jeu devient plus fluide. Je suis fasciné par les détails qui font un personnage plus que par les histoires en ellesmêmes. Agnès et son coscénariste, Michel Spinosa, ont veillé à détacher cette histoire de son vécu et à y faire naître de la fiction. Pour autant, j’avais à cœur de rester fidèle à ce que son père avait éprouvé. Je cherchais aussi à épouser son mode de pensée, car je fonctionne différemment, sauf pour les métaphores que j’utilise comme lui pour me faire comprendre. Yves sait être très technique et exact, il fallait aussi que je saisisse sa manière de raisonner.
Oui, bien sûr. Je suis un perpétuel hésitant… C’est très fatigant, ça peut mettre dans des états inconfortables et faire le lit de la mélancolie. Je ne suis pas empêché comme Yves peut l’être, mais je comprends son errance.
J’aime jouer avec mon corps, mais ici, j’ai fait en sorte de le laisser en retrait. Yves n’est pas sportif. Sa vie intérieure est si riche qu’elle laisse peu de place pour l ’extérieur. On sent bien qu’il n’attache guère d’importance à son accoutrement. Il s’habille de manière fonctionnelle sans se poser de questions.
Nous avons beaucoup parlé en amont et pendant le tournage, où nous passions des heures chaque soir à échanger. Avec ce rôle à l’opposé de ma propre personnalité, je n’étais pas dans ma zone de confort. Agnès a su m’aider à me contenir et à me laisser aller à la fois. Elle savait exactement où elle voulait m’emmener et ne lâchait rien. Elle nous laissait aussi chercher, tenter des choses. et ne cherche pas à être remarqué pour son allure.
Comédie dramatique, Romance de Agnès De Sacy. Propos recueillis par Rachel Bouillon. 3,1 étoiles AlloCiné.